Vigilant Guardian : Le gouvernement belge dans une impasse ?

photo Défense belge
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Avec la rentrée politique, le sujet brûlant des militaires dans la rue revient dans le débat politique d’autant plus que le premier Conseil des Ministres du 26 août était principalement axé sur des dossiers de la Défense: prolongation de la mission des militaires dans la rue et lancement de deux procédures de marché public pour l’armée. Le gouvernement cherche, sans trop le dire, la solution pour mettre fin à Vigilant Guardian tout en maintenant un même niveau de surveillance. Pas facile d’autant que  l’opposition se fait pressante et que les syndicats font entendre leur mécontentement. 

Des incidents entre militaires et population civile

Depuis peu, cette opération est répertoriée dans les opérations de l’armée belge sur le site officiel de la Défense. On peut lire:« Depuis janvier 2015, l’opération Vigilant Guardian (OVG) est en cours dans notre pays. Les militaires présents dans les rues offrent un appui permanent à la police grâce à du personnel qualifié prêt à intervenir lors d’événements similaires au 22 mars 2016. L’OVG permet à la population de se sentir en sécurité et de mieux comprendre le métier de soldat. (….) La Défense poursuivra coûte que coûte la protection de notre nation. » Pourtant, le journal Le Soir se fait l’écho dans son édition du jour d’incidents et d’abus venant de militaires belges d’OVG. Le député cdH de l’opposition Georges Dallemagne, par ailleurs membre de la Commission Défense Nationale à la Chambre, met en garde : »Les militaires, qui sont de grands professionnels en terrain de guerre et de combat, sont coincés depuis maintenant 18 mois dans des missions très statiques. On comprend qu’ils puissent se fatiguer,On comprend aussi qu’un manque de respect, comme ce fut prétendument le cas à Ribaucourt, attise les tensions psychologiques. » En mars, un lieutenant du 1/3 bataillon Lanciers évoquait déjà indirectement ce risque sur le site officiel de la Défense:« La discipline et la rigueur nous permettent de rester concentrés en permanence et d’anticiper la menace terroriste. Si nous perdons en concentration, incidents et problèmes peuvent survenir. »  Il ne croyait pas si bien dire !

Manque d’un cadre légal précis et adapté ?

photo Défense belge
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Le cadre légal est un autre problème. Certains syndicats dénoncent le flou de cette mission de soutien à la Police Fédérale, un problème déjà évoqué au mois d’avril dernier notamment par rapport aux fouilles de sac. Sans autorisation et présence de la Police, les militaires belges ne peuvent en aucun cas procéder à des fouilles de sac. Le problème c’est que certains militaires ne semblaient pas être au courant de ce cadre légal malgré les démentis du cabinet de Steven Vandeput. En juillet après la polémique sur la non-intervention de militaires français de l’opération Sentinelle lors de l’attentat du Bataclan en novembre 2015, Steven Vandeput avait assuré que les militaires belges déployés dans la rue avaient les moyens à leur disposition pour réagir adéquatement: »Nos militaires sont en rue dans un contexte très spécifique avec des règles d’engagement adaptées », des règles d’engagement apparemment très précises mais qui ne seront pas débattues en public. Les syndicats ne semblent pas pour autant rassurés. « Les militaires, de bonne foi, posent parfois des actes auxquels ils n’ont pas droit », explique Vincent Gilles du syndicat SLFP-Police, qui proposait en juillet dernier la présence d’un policier par patrouille militaire comme la France. Alors règles d’engagement adaptées et légales ou pas ?

georges dallemagneVers la création d’un corps spécialisé de substitution ? 

Le député Georges Dallemagne se fait pressant: « On est arrivé au bout de ce modèle d’intervention : ils (ndlr: les militaires) sont formés pour autre chose, ils manquent sur le terrain international et ils en ont assez. » On a déjà l’occasion sur ce blog de revenir sur les contraintes que posent Vigilant Guardian à l’armée et à la Composante Terre au bord de la rupture. L’idée d’une garde nationale pour remplacer les militaires dans la rue a fait le jour et le gouvernement a commencé à communiquer à ce sujet même si on parle dorénavant plus d’un corps de sécurité spécialisé et composé de militaires et de policiers. Le député y semble d’ailleurs favorable puisqu’il va déposer une résolution dans ce sens. Les différents syndicats policiers et militaires semblent plutôt mitigés. Pour les syndicats policiers, ce corps va créer des inégalités de traitement. Les syndicats militaires, eux, craignent de voir l’armée perdre encore du personnel alors qu’ils demandent du recrutement pour rajeunir et renouveler le personnel militaire. Même si l’opposition à ce nouveau projet sera sans doute beaucoup plus forte côté policier, elle devrait aussi présente au sein de l’armée.

En rajoutant également le lourd coût financier d’une telle opération (78  millions d’€ en 2016) en plus des autres problèmes évoqués, le gouvernement Charles Michel ne va pas avoir d’autre choix que de mettre fin à l’opération Vigilant Guardian mais cela est loin d’être si simple. La solution de remplacement pourrait prendre du temps à se mettre en place de façon efficace. En plus, il n’y a pas de solution parfaite et le gouvernement français est confronté au même problème. Le dispositif Sentinelle devrait être adapté avec plus de mouvements et moins de posture statique. Une idée pour l’armée belge ?

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