La Belgique s’oppose toujours à l’armement des drones MQ-9B SkyGuardian

Les drones belges MQ-9B SkyGuardian ne seront pas armés (crédit-photo
Jozef Vanden Broeck/BE Défense)

La Belgique s’oppose toujours à l’armement des drones MQ-9B SkyGuardian.

A deux ans de la livraison du premier MQ-9B SkyGuardian, la question de l’armement des drones continue de faire débat au sein de la Chambre des représentants. Le parti de la N-VA y est favorable mais les partis de la majorité sont pour certains contre. Les socialistes et les écologistes ont toujours marqué une certaine opposition à cette éventualité depuis longtemps. La ministre de la Défense Ludivine Dedonder en commission la semaine dernière a redit à nouveau aux députés que ce ne serait pas le cas sans avancer des arguments politiques.

Pour rappel, l’acquisition de drones MQ-9B SkyGuardian faisait partie des quatre grands achats majeurs de la Vision stratégique du ministre Steven Vandeput. Aucun budget n’avait été dégagé pour leur armement, qui était laissé à l’appréciation d’une décision gouvernementale supplémentaire. Le nouveau plan STAR n’a pas dégagé non plus de moyens pour cette éventualité. La question est trop sensible politiquement.

L’autre raison évoqué par la ministre a été pour le moins surprenante et a surpris les spécialistes des questions de Défense à cause de son incongruité. « Il existe une différence fondamentale entre un avion avec équipage et un drone, qui est contrôlé à distance par le biais d’ondes électromagnétique qui peuvent être sujettes à des perturbations », a-t-elle expliqué aux députés sans que cela fasse réagir. Il y a bientôt un mois, la Défense a pourtant inauguré un nouveau Cyber Command. Parmi les explications données à la presse lors de son lancement, l’accent a été mis en partie sur la protection des nouveaux systèmes qui seront livrés dans les prochaines années et qui feront appel à de la haute technologie: les F-35, les nouveaux véhicules du contrat CaMo avec le programme Scorpion, les drones ou bien encore les chasseurs de mines et les frégates. Si on suivait la ministre, tous ces matériels ne devraient pas être armés au risque d’être détournés et pourtant la numérisation est en plein essor au sein de la Défense. La Composante Cyber a bien été lancée parce que le risque cyber est devenu tellement important qu’il ne peut plus être ignoré. La Défense belge était à la traîne de ses pays voisins qui avaient déjà cette capacité depuis quelques années.

Sous-jacent de ce refus, il y a la confusion et le mélange des genres entre « drones » et « robots tueurs », une confusion que nous avions nous-mêmes fait en 2018 mais qui finalement révèle bien la difficulté d’appréhension du sujet par les politiques. En 2018, la majorité gouvernementale avait court-circuiter l’opposition en déposant sa propre résolution pour l’interdiction des robots tueurs qui avait été votée à la Chambre. « Les systèmes MALE que la Défense désire acquérir ne font pas partie de la catégorie des « drones armés totalement automatisés ». Dans l’éventualité où, après accord du gouvernement, ils seraient armés, ces MALE seront toujours contrôlés/dirigés par un pilote (c’est pourquoi on parle de Remotely Piloted Aircraft System, RPAS). Celui-ci est à tout moment responsable de l’appareil et de ses actions. Si, le cas échéant, il devait y avoir utilisation de la force, ce pilote est soumis aux règles d’engagement définies par le Gouvernement belge et ce exactement comme pour les opérations F-16 avec aussi un RCH (Red Card Holder). Il faut voir ces avions exactement comme un avion habité, type F-16, sauf que le pilote ne se trouve pas à bord », expliquait le colonel Luc Cruysberghs, alors responsable du programme MALE RPAS, en commentaire sur notre site à l’époque. L’intérêt d’armer les drones pourrait être de compenser à moindre frais la flotte limitée de F-35 alors que la Belgique a déjà dit qu’elle ne ferait pas de commande supplémentaire. Cela explique pourquoi l’état-major de la Défense a envoyé une note à la Chambre « montrant que l’armement des drones est techniquement et juridiquement possible, militairement souhaitable et éthiquement préférable » selon les mots du député Peter Buysrogge (N-VA). Mais le gouvernement belge ne souhaite pas changer sa position au risque d’être encore à la traîne sur un sujet qui est en plein développement.

En Europe, trois pays ont décidé d’armer leurs drones MQ-9 Reaper ou Predator selon les modèles: la France, l’Italie et le Royaume-Uni. Aux Pays-Bas, cette possibilité reste ouverte si le gouvernement le décide. C’est toujours à l’étude.

12 commentaires

  1. Je n’ai pas lu l’article et je m’en excuse auprès de Marie-Madeleine Courtial mais quand j’ai lu le titre, j’en suis tombé par terre et je n’en ai pas eu le courage.
    Pour ceux qui ne le savait encore, le fait d’hésiter sur le sujet , démontre à quel point on peut être cons en Belgique et ignorants.
    En effet, s’il y a un enseignement a tiré du conflit russo-ukrainien , c’est bien le rôle formidable que jouent les drones en général et les drones d’attaque en particulier. Parmi ceux-ci les drones turc Bayraktar TB2 utilisés par les Ukrainiens. Ceux-ci ont infligé des pertes considérables dans les rangs des chars russes sans bien-sûr exposer un pilote.
    Alors que la Belgique manque cruellement de missiles anti-char, n’a pas d’ hélicoptère d’attaque anti-char type Apache et n’aura pas ses canon Caesar avant au moins 2 – 3 ans voilà-t-il pas que l’on fait la fine bouche et que l’on va renoncer au potentiel offensif de drones à 40 millions d’euros l’unité. L’utilisation de ces drones à 25% de leur capacité (l’observation) constitue un gaspillage scandaleux des deniers publics qui s’ajoute à l’épisode de la vente des M109 au prix du rebus (voir mes 2 commentaires d’avant hier) et à l’achat des piranhas DF90 peu opérationels avec leur canon insuffisant pour faire sauter un char moderne (ratage complet).
    SVP STOP A LA CONNERIE. J’EN AI MARRE DE PAYER DES IMPOTS POUR ENTRETENIR GRASSEMENT DES POLITICIENS PAREILS.

    Pour ceux qui aiment mes articles , je vous invite à lire celui du 5 juillet 2022 également sur les drones. Il a été écrit sur le ton humoristique car parfois , il vaut mieux se forcer à rire de peur de devoir en pleurer.

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  2. Une armée se construit et se dirige avec l’esprit de foutre un ennemi éventuel en l’air et pas de le ménager. Celui-ci n’aura pas tant de scrupules et nous anéantira.
    Manifestement nos parlementaires sont dans une logique de paix et pas dans une logique de guerre , de combat. Comme on dit en football , ils ne sont pas encore entrer dans le match. Après neuf mois de conflit , ça fait quand même long pour que le franc tombe. Incroyable!

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    • On voit très bien ce qui se passe à la frontière Polonaise qui a vu ses deux 1eres victimes en territoire EU et le profil bas affiché par l’ OTAN et l’EU en particulier la France qui en tremble encore .
      Et si c’était ZELINSKY qui avait raison : ce sont bien des missiles russes tiré par la Russie ???
      En tout cas moi qui ne suis pas « fin stratège » il m’est bien difficile de comprendre comment un missile Ukrainien donc tiré vers l’ EST a fait demi-tour vers la Pologne : Stupéfiant !!!

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  3. En matière militaire, la naïveté tue… le niveau d’utilisation est donné par le plus méchant, forçant les autres à s’aligner pour ne pas être dépassés. Ca a été ainsi en 1914-1918 avec l’utilisation des gazs de combat par les allemands, idem en 40-45 avec les bombardements allemands « stratégiques » des villes pour terroriser les populations (ce qu’il faisaient déjà en 14-18 d’ailleurs)… Mais le premier qui l’utilise a pour un temps l’avantage stratégique, et dans certains cas ça suffit à gagner la guerre, même en étant le « méchant ». Les écolos devraient être écartés des décisions en la matière, ils se font involontairement alliés de l’ennemi en cas de tension ou de conflit, la guerre est une affaire trop sérieuse pour la faire gérer par des dilettantes.

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  4. Étonnant comme décision
    Si je comprends bien le drone fait de la reconnaissance identifié une cible puis on passe le relais à un avion de chasse ou de bombardement qui vient finir le boulot
    Résultat au minimum trente minutes perdues
    Ce problème était le même en France mais heureusement un ministre a décidé de les armer ce qui s’est avéré très efficace au Sahel

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  5. Stupide contretemps pour des chicailleries hors sol d’un « humanisme » de façade au rabais!

    L’hélicoptère de combat est amené à disparaitre, même si par habitude beaucoup ne veulent ni l’admettre ni l’anticiper.

    Le drone armé est l’avenir, l’Ukraine nous le démontre même au plus abruti.
    https://lerubicon.org/publication/dans-le-deni-sur-le-deni-pourquoi-le-succes-aerien-de-lukraine-doit-inquieter-loccident/

    Et la Belgique passerait à côté!!!

    Ainsi on continuera à voir des pays qui vont en acquérir (ou en développer) confortant l’habitude et la continuation d’un système, la Belgique comprendra qu’il faut anticiper pour s’adapter à un environnement/besoin futur qui n’est pas celui d’aujourd’hui.

    Vous allez me dire de quoi je parle ?
    Tout le monde pourtant en voit déjà le contour, ceci depuis des années, c’est l’évolution et le rôle du drone.

    Qu’est-ce qu’on attend d’un hélicoptère de combat? Surveillance et appui (on balance des munitions) à proximité du sol, donc souvent en accompagnement des troupes terrestres.

    Aujourd’hui on a des drones qui permettent la surveillance et qui développent de plus en plus l’appui, ceci pour des coûts bien plus faibles, pour une durée de mission bien plus longue, tout en étant une perte matériel acceptable.

    Ces drones sont plus rapides et moins coûteux à acquérir, ils font même de l’ombre à l’aviation classique qui va également devoir évoluer pour les inclure comme une partie à part des moyens à engager.

    Nous en faisons l’expérience, il est préférable d’avoir un Reaper qui va suivre pendant 20 heures une force terrestre, qui est capable de délivrer immédiatement de la GBU-12 ou du Hellfire que d’avoir des avions ou des hélicos en alerte qui mettront du temps à venir et qui ne peuvent pas rester longtemps sur place.

    C’est devenu évident pour les conflits asymétriques, mais ça le devient aussi pour les conflits plus conventionnels entre états dans lesquels on voit la pertinence d’avoir des drones d’observation en très grand nombre.

    Très peu coûteux qui serviront aussi à « capter » les missiles anti-aérien adverse, mais aussi de drones pour frapper avec précision des cibles plus ou moins éloignées.

    Cette réalité fait que le besoin en hélicoptères et en avions diminuera, forcément on ne peut plus vouloir faire comme avant, comme s’il fallait toujours autant d’avions de combat, on est dans une logique de remplacement, voir carrément d’abandon de c
    ertaines missions comme la reconnaissance et l’observation.

    Nous devons exceller dans la sécurisation des liaisons et le partage de l’information.

    Les drones évoluent vite, bien plus vite que les avions, dans 10 ans presque tous ce qu’on voit aujourd’hui sembleront déjà dépassé.

    C’est un facteur à prendre en compte, on ne doit pas penser acquérir des drones pour 30 ou 40 ans, il faut penser à un système de conception et de production en constante évolution et adaptation.
    Créer des kits démontables et adaptables et non pas un drone tout en un.

    Le non renouvellement des hélicoptères de combat permettra de transformer notre ALAT en lui intégrant un large volume de drones.

    Au moins on ne fait pas l’erreur de balancer 5,5 milliards d’euros pour le standard 3 du Tigre.

    Des drones armés apportent des capacités bien plus intéressantes que les hélicoptères de combat, qu’ils sont bien moins coûteux à produire, soutenir et donc à remplacer dans un conflit d’attrition et il n’a pas de pilote à allee secourir au milieu des ennemis.

    Ces drones évoluant par la suite en complément des drones plus lourds de ma composante air, mais aussi plus légers (drones suicides ou munitions autonomes comme il vous plaira de les appeler).

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  6. Désolant, politique bisounours, politiques qui se donnent des airs de bonne gouvernance sous prétexte de retenue, de gestion en bon pères de familles qui se donnent bonne conscience en prêtant la retenue, la réflexion, les analyses débiles qui vont à l’encontre des décisions et investissements de toutes les autres nations. Acheter ce type de drone et ne pas les armer ?? C’est comme les Frégates, finalement il n’ y aura qu’une seule cellule de lancement de missiles au lieu de 2, choix pertinent et ambitieux des Pays bas. Que nos MINISTRES SE LE METTENT BIEN EN TETE : LES ARMES, C’EST FAIT POUR TUER ! On évite bien sûr de tuer mais lorsque c’est impossible les armes à utiliser pour se défendre doivent être efficaces et exploitées à leur plein potentiel. La retenue, la tergiversations, faire croire que la Belgique est un pays à part par se retenue en quête de pacifisme, je ne vis pas dans le même monde que les politiques ecolos et socialistes, à mon avis.

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  7. Pour la contre-guérilla, cette solution est utilisée car il n’y a pas de guerre électronique employée en face.

    Dans un véritable conflit, les gros drones, font du renseignement loin de la défense anti-aérienne, ce sont les petits drones employés comme du consommable et abattus en grand nombre, qui font le taf:

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