Le nouveau chasseur de mines belge, une véritable boîte à outils révolutionnaire

Le M940 Ostende arrivera à Zeebruges fin 2024 (crédit-photo Marie-Madeleine Courtial/A l’Avant-Garde)

Le nouveau chasseur de mines belge, une véritable boîte à outils révolutionnaire.

La Composante Marine recevra son premier nouveau chasseur de mines, le M940 Ostende, fin 2024. Les Marines belge et néerlandaise ont lancé un nouveau système révolutionnaire dans le domaine de la lutte contre les mines, appelé à devenir une référence dans les marines de l’OTAN. Ces nouveaux navires de classe City et Vlissingen auront pour principale différence par rapport à leurs prédécesseurs d’effectuer leur mission à l’aide de drones de sorte qu’ils ne se trouveront pas directement dans le champ de mines, une véritable avancée. Ils utiliseront des drones aériens sans pilote (UAV), des drones de surface sans pilote (USV) et des drones sous-marins autonomes (AUV). Pour embarquer et déployer cette « Toolbox » de différents drones, le chasseur de mines disposera d’un héliport pour les UAV et d’un hangar avec deux systèmes de lancement et de récupération (bâbord et tribord) pour les USV.

Depuis 2005, la Composante Marine utilise déjà un drone sous-marin le Remus. Ce dernier est exploité par l’équipe VSW (Very Shallow Water), qui fait partie de la Mine Warfare Unit du département Opérations de Zeebruges et qui est spécialisée dans la détection d’engins sous-marins en eaux peu profondes. Cette équipe VSW est régulièrement déployée sur les chasseurs de mines lors de missions en mer Baltique ou d’exercices. Cependant, le Remus présente certaines limites importantes, à savoir le manque de communication avec les navires et le temps, la distance et la profondeur opérationnels étant limités.

Des drones serviront à la détection et l’identification des mines et d’autres à leur neutralisation (schéma Exail Robotics)

Le nouveau concept développé prévoit que les drones sous-marins seront chargés à bord de l’USV, après quoi ils seront rapidement amenés à des dizaines de kilomètres du vaisseau-mère. Une fois dans le champ de mines, ils se lanceront de manière autonome. Dans cette zone, les drones sous-marins assurent la détection, l’identification et la destruction des mines. L’UAV assurera non seulement des missions ISR (Intelligence, Surveillance, Reconnaissance) mais aussi des missions de détection et d’identification des mines de surface depuis les airs. Seuls trois pays: la Corée du Sud, les Etats-Unis et le Japon utilisent des moyens aériens dans la lutte contre les mines mais ils le font avec des hélicoptères alors que la Belgique et les Pays-Bas utiliseront un drone aérien sans pilote.


UMS Skeldar V-200

L’UMS Skeldar V-200 est l’UAV qui sera chargé de détecter et d’identifier les mines de surface (crédit-photo Marie-Madeleine Courtial/A l’Avant-Garde)

L’UMS Skeldar V-200 sera fourni par l’entreprise suédoise Saab. Il est déjà utilisé par d’autres marines au sein de l’OTAN mais pas depuis des chasseurs de mines.

Caractéristiques:

  • Longueur : 4 m
  • Largeur : 1,2 m
  • Hauteur : 1,3 m
  • Poids maximum au décollage : 245 kg
  • Altitude maximale de décollage : 3.000 m
  • Charge maximale : 40 kg
  • Vitesse maximale : 140 km/h
  • Distance franchissable : 150 km
  • Endurance : plus de 6 heures
  • Puissance : 55 ch
  • Plafond opérationnel : 4.500 m
  • Temps de préparation avant décollage : moins de 15 minutes

USV Inspector 125

L’USV Inspector 125 (crédit-photo Exail)

Chaque chasseur de mines embarquera deux USV Inspector 125, qui seront les pièces maîtresses de la toolbox. Après des essais industriels concluants à Toulon, une démonstration de l’opération de déploiement et de récupération de l’USV a eu lieu le 13 janvier 2022 en présence des Marines belge et néerlandaise. L’USV Inspector 125 a une autonomie de 48 heures et opère par état de mer 4 grâce à un système antiroulis éprouvé qui réduit le roulis de 40 %. Il peut également être configuré pour y accueillir une équipe de plongeurs démineurs ou de force protection. Les Marines belge et néerlandaise en recevront 17. Le système est en production depuis le deuxième semestre 2022.

L’USV Inspector 125 sera lancé depuis le navire (crédit-photo Marie-Madeleine Courtial/A l’Avant-Garde)

A18-D

L’A18-D (crédit-photo Marie-Madeleine Courtial/A l’Avant-Garde)

L’A18-D est capable d’effectuer des plongées de plus de 24 heures et d’opérer jusqu’à 3000 mètres de profondeur. Un ATD (Automatic Target Detection) permet de détecter automatiquement et de trier les objets détectés en déminage sous-marin. Des modules de navigation par reconnaissance d’amers sous-marins permettent des recalages de navigation améliorant ainsi significativement la précision du positionnement de données. Les versions militaires de l’AUV A18 sont spécialement étudiées pour avoir des signatures magnétique et acoustique les plus faibles et compatibles des normes OTAN. 

A9-M

L’A9-M (crédit-photo Marie-Madeleine Courtial/A l’Avant-Garde)

L’A9-M a pour fonction de détecter des mines mais aussi de les classifier selon les conditions environnementales et le type de fond marin. Il peut avoir une autonomie jusqu’à 20 heures lorsqu’il est équipé de deux batteries. Grâce à son système de précision de navigation unique, des données exceptionnelles peuvent être recueillies à partir de différents capteurs en une seule sortie. L’A9-M est équipé d’un balayage latéral pour des images haute résolution.

R7/ROV

Le R7/ROV (crédit-photo Marie-Madeleine Courtial/A l’Avant-Garde)

Le R7 de la famille ROV (Remotely Operated Vehicle) peut effectuer toutes missions sous-marines jusqu’à 300 m de profondeur dont l’inspection, l’observation, la surveillance, la maintenance, et la récupération d’objets. Il possède une qualité d’images parmi la plus élevée du marché grâce à une chaine vidéo entièrement full HD allant des capteurs caméra aux écrans de visualisation.

K-STER C

Le K-STER C (crédit-photo Marie-Madeleine Courtial/A l’Avant-Garde)

Le K-STER C, piloté depuis la terre ou un bateau mère et mis à l’eau depuis un USV, est entièrement qualifié en tant que munition. Équipé d’une tête orientable dont le profil ne change pas la trainée du robot lors de l’orientation de la tête, il est capable de viser la zone de la mine contenant l’explosif avec une précision remarquable même dans un courant de 3 nœuds. Ce dispositif lui donne une probabilité de destruction de la mine proche de 100% et sa charge explosive permet une détonation complète de la mine.


Ces drones seront construits dans une nouvelle usine qui a été inaugurée à Ostende mi-2022. Steven Luys, CEO d’ECA Robotics Belgium, indique dans un article récent au De Tidj que les premiers drones sortiront de l’usine à la fin de l’année. L’usine devrait atteindre sa vitesse de croisière l’année prochaine avec pour objectif de produire un à deux drones par jour à terme. Ostende accueille aussi le laboratoire MCM et le groupe R&D (recherche et développement) dédiés à l’innovation des futures capacités MCM. De plus ECA Robotics Belgium a aussi inauguré un Cyber Lab à Bruxelles le 28 avril 2022. Ces deux laboratoires de recherche collaboratifs rassemblent des partenaires institutionnels, industriels et académiques européens (principe de la Triple Helix) pour développer des innovations dans le domaine de la lutte contre les mines et de la cybersécurité.

Le laboratoire MCM collabore ainsi avec Naval Group, Exail Robotics (anciennement ECA Group), Anglo Belgian Corporation (ABC), dotOcean, Space Applications Services, l’université de Gand, l’université libre de Bruxelles (ULB), l’Institut Flamand de la Mer (VLIZ), l’Institut royal des Sciences naturelles de Belgique (IRSNB) ainsi que l’Institut royal supérieur de Défense (IRSD).

De son côté, le Cyber ​​​​Lab se concentre sur le développement de technologies de cybersécurité pour les applications maritimes, telles que les systèmes de navires, les drones et les infrastructures terrestres. Outre les experts cyber de Naval Group, des partenaires belges et européens, tels que NVISO, une entreprise bruxelloise de cybersécurité qui s’est développé sur le sol européen avec des bureaux en Allemagne, en Autriche et en Grèce, sont également impliqués dans les travaux. Le Cyber Command de la Défense, tout juste lancé en octobre 2022, suivra ses développements et les intégrera au sein de la Défense dans la mesure du possible.

La cloche du premier chasseur de mines M940 Ostende (crédit-photo Marie-Madeleine Courtial/A l’Avant-Garde)

Après l’arrivée du premier chasseur de mines M940 Ostende, les navires seront ensuite livrés en alternance à la Belgique et aux Pays-Bas à partir de 2025. Le M945 Rochefort entrera en service en 2030. Les marraines des deux premiers navires sont déjà connus et sont des sportives de haut niveau: Emma Plasschaert, une skipper, pour le chasseur de mines Ostende et Camille Laus, une athlète spécialiste du 400m, pour le chasseur de mines Tournai.

Caractéristiques techniques du nouveau chasseur de mines:

  • Longueur: 82,6 m
  • Largeur: 17 m
  • Tirant d’eau: 3,8 m
  • Poids: 2.900 tonnes
  • Vitesse: 15 noeuds
  • Equipage: 63 personnes
  • Armement:
    • canon Bofors 40 mk4 de 40 mm 
    • 2 mitrailleuses 12,7mm FN Herstal Sea DeFNder
    • 4 mitrailleuses MAG 7,62mm
    • 2 armes acoustiques LRAD

11 commentaires

  1. Enfin, un matériel au top dans l’armée belge.
    A noter , l’armement défensif de bord plus puissant que sur nos patrouilleurs : canon Bofors 40 mk4 de 40 mm ,2 mitrailleuses 12,7mm FN Herstal Sea DeFNder,4 mitrailleuses MAG 7,62mm, 2 armes acoustiques LRAD

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  2. La sécurité des chenaux d’accès à des ports comme ceux d’Anvers, Rotterdam etc, ainsi que la protection des fonds d’autres sites marins à haute valeur économique et stratégique ont besoin de ce type de systèmes novateurs. Sauf erreur, la Belgique et les Pays Bas sont ici « dans le clous » en temps et en heure. C’est à retenir et à citer en référence. Bravo !

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  3. Je viens de relire votre article très complet donc le bon niveau qui est consacré au projet des Chasseurs de mines. Aussi et si que vous en avez encore l’occasion, je ne peux que vous inviter et encourager à reproduire ici le même type de travail certes très prenant, mais qui cette fois serait consacré aux futures frégates ASWF. Encore merci.

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