[Interview] Général de brigade Peter Devogelaere: « Nous devons redoubler d’efforts pour aider l’armée malienne à lutter contre le terrorisme »

Le général de brigade Peter Devogelaere (photo EUTM Mali)
Le général de brigade Peter Devogelaere (photo EUTM Mali)

Interview avec le général de brigade Peter Devogelaere, commandant de l’EUTM Mali depuis décembre 2016.

Le 19 décembre 2016, le général de brigade Peter Devogelaere a pris le commandant de l’EUTM Mali succédant à son compatriote le général de brigade Éric Harvent. Depuis juillet 2016, la Belgique est à la tête de cette mission de l’UE avec un détachement d’un peu plus de 150 militaires. C’est l’opération à l’étranger la plus importante pour la Composante Terre de l’armée belge. Pour le blog À l’Avant-Garde, le général de brigade Peter Devogelaere revient sur sa préparation à cette fonction, la mission des militaires belges et l’évolution de l’EUTM Mali.

« Le but est de délivrer nos formations là où l’armée malienne en a besoin »

Le commandement de l’EUTM Mali est une fonction importante, qui engage la crédibilité de l’armée belge. Comment avez-vous préparé cette nouvelle prise de commandement à la tête d’une mission de l’UE ? Avez-vous échangé avec votre prédécesseur le général de brigade Éric Harvent ? 

Le cycle de préparation pour une mission de cette importance s’étalait effectivement sur plusieurs mois. Il comportait, entre autres, une période de deux semaines appelée « pre-deployment training » à Otterburn en Écosse, pendant laquelle tous les membres belges du futur MHQ (Main Head Quarter) de l’EUTM Mali ont effectué une remise à niveau intensive dans toute une série de domaines (tirs, premiers soins, préparations spécifiques pour la mission, familiarisation avec le fonctionnement futur de l’EM de l’EUTM Mali.. etc). Cette période a également permis d’assurer la cohésion du groupe composé de militaires venant de différents horizons. Pendant la phase de préparation, le personnel clé de l’état-major a également reçu les formations nécessaires concernant le fonctionnement des institution européennes et plus particulièrement du EEAS (European External Action Service) dont dépend l’EUTM. Pour ma part, j’ai eu également différentes réunions de préparation au niveau Strat/Pol au sein du EEAS. Pendant les mois qui ont précédé notre départ, j’ai été en contact régulier avec mon prédécesseur et je me suis rendu sur place pour une période de reconnaissance.

 

Le général de brigade Peter Devogelaere sur le terrain dès le début de son mandat (photo EUTM Mali)
Le général de brigade Peter Devogelaere sur le terrain dès le début de son mandat (photo EUTM Mali)

Quelles seront les principales priorités de votre mandat ?

Le but premier de l’EUTM Mali est de contribuer à la restauration des capacités des Forces Armées maliennes (FAMa). L’objectif est qu’elles redeviennent capables de mener des opérations pour rétablir l’intégrité territoriale du Mali et réduire la menace terroriste. Nous sommes dans le troisième mandat de la mission qui doit voir notre zone d’action s’étendre jusqu’à la boucle du Niger, le but étant de délivrer nos formations là où l’armée malienne en a besoin. Cette décentralisation est bien entendu conditionnée par l’évolution de la situation sécuritaire dans le pays. Je rappelle que l’EUTM Mali est une mission non exécutive et non une opération : les militaires déployés ne sont pas destinés à participer à des missions de combat et n’accompagnent pas les unités maliennes dans les opérations. Au niveau des formations dispensées, une attention toute particulière est donnée au leadership et au respect des droits humains.  L’ATF (Advisory Task Force) de l’EUTM Mali joue également un rôle très important en assistant l’état-major dans le processus de transformation des FAMa.

Pour l’instant, l’EUTM Mali est localisée à Koulikoro et Bamako. Dans une interview à Bruxelles2, début décembre, votre prédécesseur le général de brigade Éric Harvent évoquait la possibilité d’aller à Gao en 2017. Qu’en est-il ? L’EUTM Mali est-elle appelée à se déplacer ?

La mission décentralise progressivement ses activités vers les régions en déployant des équipes mobiles de formateurs et de conseillers, dites CMATT (pour Combined Mobile Advisory and Training Teams). DEUX CMATT ont déjà été organisés à Segou et Kati .  D’autres sont en préparation. En ce qui concerne Gao, il est effectivement dans nos intentions d’y organiser un CMATT, mais le moment et les modalités dépendront de l’évolution de la situation dans la région.

« Notre collaboration avec la force Barkhane est appelée à se renforcer »
Le 17 janvier 2017, le général de brigade Peter Devogelaere a reçu la visite du général de division François-Xavier de Woillemont, commandant de la force Barkhane (photo EUTM Mali)
Le 17 janvier 2017, le général de brigade Peter Devogelaere a reçu la visite du général de division François-Xavier de Woillemont, commandant de la force Barkhane (photo EUTM Mali)

L’enlèvement d’une ressortissante française à Gao au mois de décembre ainsi que le récent attentat meurtrier dans cette même ville montrent que la situation au Mali est toujours instable et qu’il ne faut pas baisser la garde. La protection de l’EUTM Mali est-elle d’autant plus indispensable ? Y a-t-il une collaboration avec la force Barkhane ? 

Nous connaissons en effet une recrudescence de la violence, particulièrement dans le nord et dans le centre du pays. L’attentat de Gao le 18 janvier est le plus meurtrier qu’ait connu le Mali ces dernières années et le processus de paix est mis à mal depuis quelque temps. Le MOC (Mécanisme Opérationnel de Coordination) peine à se réaliser concrètement sur le terrain et la mise en œuvre des patrouilles mixtes est sans cesse retardé. L’attentat du 18 janvier est un coup dur porté au processus de paix, mais j’espère que les Maliens trouveront les ressources nécessaires pour surmonter l’obstacle. Il nous faut en tout cas redoubler nos efforts pour aider les FAMa à relever le défi de la lutte contre le terrorisme et cela demandera une collaboration étroite entre tous les acteurs internationaux présents au Mali (MINUSMA, Barkhane, EUTM). Pour répondre à votre question : nous sommes effectivement en contact permanent avec Barkhane et notre collaboration est appelée à se renforcer avec l’avancée de notre processus de décentralisation, principalement vers le nord.

« La mission première de l’EUTM Mali reste l’entraînement et la formation »

 Entre formation et protection, comment se répartit le détachement belge de l’EUTM Mali ? Quelle est sa fonction première ?

Avec 164 militaires, le détachement belge est le plus important de l’EUTM Mali et couvre tous les aspects de la mission (officiers d’état-major, instructeurs, advise & assist, force protection, appuis…)

La Force Protection à proprement parler compte 94 militaires issus du 3ème bataillon de Parachutistes. 21 militaires belges s’occupent des activités de training et des formations. La mission première de l’EUTM Mali se concentre bien entendu sur les activités training et la force protection est là pour assurer la sécurité aussi bien des instructeurs que des militaires maliens qui suivent les formations dispensées.

 Vous allez en quelque sorte être de nouveau à la tête du 3ème bataillon de Parachutistes. Qu’est-ce que cela fait de retrouver son ancienne unité ? Cela va-t-il faciliter votre commandement à la tête de l’EUTM Mali ?

Comme vous l’avez compris, la force protection n’est qu’un des aspects de la mission et les militaires qui composent l’EUTM Mali proviennent de 26 pays différents. La provenance du détachement belge de force protection n’a donc pas vraiment d’importance, même si cela fait toujours plaisir de retrouver quelques anciens …

 

2 commentaires

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